Personne ne se rend compte de la chance qu’ils ont de savoir aimer. Cela vous parait tellement normal que vous oubliez que de savoir aimer c’est important et que ce n’est pas donner à tout le monde. Savoir aimer n’est pas éternel, c’est une capacité qui peut se perdre très vite, j’en suis la preuve réelle. Je suis le vivant qui ne sait pas aimer. L’être sans-sentiments. Je suis le félin sans émotions. Le demeurant qui ne sait ni aimer ni détester. Le mâle sans émois. Le résultat de la guerre de l’amour et de la haine, il est resté un cœur froid, vidée de l’amour ardent qui brûlait les entrailles, vidée d’une haine irritante qui ravivait les flammes. Je suis le passant qui respire l’indifférence. Je suis moi. L’inexpressif. Celui qui n’éprouve rien et n’éprouvera jamais plus rien. Je suis le présent existant. Je suis le errant que vous ne connaitrez jamais. Celui qui ne dira jamais « je t’aime ». Je suis Nostalgie des Sentiments.
[12 moons ago]
Aujourd’hui je suis passé à deux pattes de la mort. Une expérience rare. J’étais sur le chemin du tonnerre, puis un monstre énorme m’a foncé dessus. Je suis passée entre les deux roues. J’aurais pu mourir. C’est étrange mais depuis ce moment-là, pour moi rien n’a d’importance. Insulté moi je n’aurais pas de peine. Taper moi je n’aurais mal qu’à l’endroit où vous aurez frappé, mon cœur sera inaltéré. J’en veux au monstre. Cependant je n’en veux pas au monstre. C’est compliqué. Pourtant c’est très simple. Je n’ai plus de sentiments. Plus rien. C’est original et à la fois banal. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Je n’ai jamais eu beaucoup d’émotions mais je n’ai jamais été dans cet état. Je ne comprends pas. Je ne cherche pas à comprendre. Je vis. C’est comme ça.
Je pouvais retrouver mes proches mais il n’en était pas question. D’ailleurs le mot « proche » n’est plus valable puisse que je n’ai plus le sentiment d’aimer. Ce sont des passants, oui des passants, des passants qui cherche leur chemin, des passants que je ne peux pas aider, des passants qui n’ont rien à voir avec moi, des passants qui marchent, des passants du temps. Pourquoi aller voir ceux qu’on ne connait pas ? Somme toute cela ne peut pas me faire de mal, puisse que je ne ressens rien. Mais je ne peux pas associer le passé et le futur. La capacité à aimer et l’incapacité à aimer. Le jour et la nuit. La clarté et l’obscurité. Le dramatique et le tragique. Le blanc et le noir. Le départ et l’arrivée. L’été et l’hiver. La joie de la nostalgie et la nostalgie de la joie. Oh, vous vous attendez tous à ce que je dise : « Le bien ou le mal. » ? Désolé, vous allez être déçu. Je n’ai pas de sentiments, je ne sais que trop vaguement ce qu’est le bien et le mal. Il ne me reste que des interdictions et des encouragements laissés par ma maman quelque part dans ma tête. J’ai tout de même une conscience, puisque je peux vous parler de mes sentiments passés. Seule la mort signera la fin de ma conscience. Mais je n’ai pas la conscience libre. De toute façon vous ne savez pas, comme moi, ce que c’est de ne pas avoir de conscience car vous n’avait jamais vécu sans. Je ne vais pas m’attarder sur le sujet pourtant intéressant mais trop complexe.
Il me fallait un nouveau départ. Ma vie était coupée en deux. J’étais sur la coupure. L’endroit le plus désert. J’allais vers l’autre moitié de ma vie. Je courrais vers les collines qui séparaient une terre de l’autre. Le chemin allait être très long et fastidieux. Les collines étaient abruptes et pleines de cailloux. J’escaladai la pente qui rejoignait le chemin pour traverser les collines. Aux milieux de la pente je m’arrêtais pour reprendre mon souffle. Le chemin allait être long comme je disais, très long. Je pris de l’élan et gravit le reste. Je sentis une coulée de cailloux partir sous mes pattes et m’agrippai en haut, sur le chemin. Je me retournais et regardai les cailloux partirent. Je vis alors là où je vivais de haut, pour la première fois. Les petits cailloux venaient me remplacer. Je repris le chemin en trottinant, il fallait que je trouve un endroit pour dormir loin de mon ancien habitat. Le soleil tapait sur mes épaules et de gouttelettes de sueur roulaient sur ma peau. Mes poils se collaient entre eux et même les battements frénétiques de ma queue pour refroidir l’air ne parvenaient pas à amener, ne serais-ce-que, un léger vent frais. Il n’y avait pas d’eau et je ne voyais pas une tache bleue à l’horizon. J’aperçus de l’ombre plus loin sur le chemin et accéléra pour y parvenir avant d’être complétement désaltéré. Rapidement j’attendis les imposants confièrent. Je m’allongeai au tronc de l’arbre et en profitai pour regarder ce qui me picotait le coussinet : c’était une épine. Là où il y avait de l’ombre il y avait les épines, là où il n’y avait pas d’épines il y avait le soleil. Je léchai ma patte pour enlever le sang qui s’était, malgré la petite taille de l’épine, mis à couler. Quelque temps plus tard je continuai mon chemin pour encore bien de nombreux jours.
5 lunes plus tard, j’étais déjà très loin. Ma peau collait à mes os, mes griffes étaient en très mauvais états, mon poil était crasseux, et de la terre craquelée et séchée couvrait mes pattes. Jusqu’à présent je n’avais trouvé que de petites rivières qui ‘m’avait permis de boire assez pour subsister. Le gibier se faisait rare, où plutôt le gibier que j’arrivais à attraper se faisait rare. En 5 lunes c’est comme si j’avais vieilli de 10 lunes. Mes muscles semblaient rouillés, ma voix rauque, mon museau irrité par la poussière qui vole, mes griffes n’étaient plus dignes de s’appeler griffes, je n’arrivais plus à faire attention aux bruits des proies, et quand je les entendais je n’arrivais pas à les attraper. Je ne mange presque rien. J’ai plus de force. C’est sans doute pour cette raison que le chat qui se trouvait devant moi me regardait avec des yeux écarquillés. Il me dévisageait. Je me sens reconsidéré. Si il pouvait me donner à manger aussi se serait bien. Me trouver de l’eau aussi. Non, non je ne suis pas un assisté. Juste un jeune vieux qui ne peut pas se débrouiller seul. Nuance. Le félin en face semblait très musclé, surtout à côté de moi, incroyablement gros, massif et beau. Il avait le poil gris. Brillant. Moi aussi j’ai le poil gris. Le mien est terne et morne. En réalité, lui là, devant moi, c’est moi en parfait. Puis je suis moi en imparfait. Ah nan attendez ce n’est pas logique. Je ne peux pas être moi en imparfait puisque si je suis moi, y’a pas représentation plus parfaite de moi. Lui il est imparfait et moi je suis parfait. Ça me rassure. Pourtant moi je voulais connaitre le moi parfait. Je deviens fou. Ce n’est pas grave. Si c’est grave. Je fais des dialogues seul dans ma tête. Le pire c’est que je ne suis pas d’accords avec moi. J’ouvris les oreilles parce que le chat en question ouvrit sa bouche, les oreilles et la bouche c’est reliés alors, si je comprends bien. :
« Tout vas bien ?
-J’ai l’air d’aller mal ? Eh attends moi je suis moi parfait et toi tu es le moi imparfait ou c’est l’inverse ?
-Chut, c’est quoi ton nom ?
-Je n’en ai pas. Je n'en ai plus.
-D’accords … Tu viens d’où ?
-Je ne sais pas. Je ne sais plus.
-Tu as l’air d’avoir faim en tout cas.
-Je ne sais pas. Je ne sais plus.
-Tu es sale aussi.
-Je ne sais pas. Je ne sais plus.
-Arrête ! Fait un effort au lieu de t’apitoyer sur ton cas !
-Je ne m’apitoie pas sur mon cas. Ça je le sais.
-*soupire* Bon viens il y a un lac peu profond là-bas, tu vas te rafraichir les idées.
-Oh oui, un lac j’en cherche depuis que je suis parti.
-Voilà, merci qui ?
-Merci toi, l’imparfait moi.
-Pourquoi tu parles tout le temps de façon neutre ?
-Parce que je n’ai pas de sentiments depuis que je suis passé sous un monstre. Parfois je me dis que j’ai eu trop peur.
-*éclat de rire* Pardon, mais tu me fais trop rire !
-Tu as le droit de ne pas me croire. Tu as le droit puisque tu es moi, en imparfait.
-Arrête avec cette histoire, je ne suis pas toi ! Compris ? Trempe-toi dans le lac, dépêche-toi !"Je fis ce que l’imparfait moi disait. Il devait avoir mon âge mais il me donnait des ordres. Je m’ne fichait. Au plutôt comme je ne savais pas ce que ça me faisait je me disais que je m’en fichais. L’eau fraiche me fit frissonner. La terre de mes pattes partit peu à peu sans que je ne fasse rien. Je me plongeai complétement et gigotai. Je voulus remonter à la surface mais je n’y arrivais pas. Je bougeais et remuait les pattes comme je pus mais je ne remontais pas. Soudain je remontais, mon coup me faisait mal. C’était ce chat gris. Il m’avait récupéré. Il me criait de faire attention. Je n’écoutais pas. De toute façon il est là si je me re-noie.
[7 moons ago]
Je n’avais toujours pas quitté ce chat. Je n’ai pas de sentiments mais je sens les sentiments des autres. Et bizarrement il s’était attaché à moi. C’était mon coach. Pourtant depuis que j’avais repris mon voyage il me suivait et ne parlait juste pour faire des remarques sans intérêts comme « Ce paysage est splendide » ou « Je te remercie sincèrement sans toi je n’aurais jamais découvert de tels lieus ! ». Sauf que pour lui elle avait une valeur, et à chaque fois qu’il prononçait ces phrases je sentais qu’il se remplissait d’émotions. C’est à ce moment précis qu’on peut déduire que sentir et ressentir sont deux choses totalement opposé. Je ne disais rien. Je n’avais rien à dire. L’imparfait moi me suivait sans broncher. Je continuais mon chemin tout comme si il n’était pas là, sauf, qu’il était là. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Marcher. Presque ma seule activité. C’était devenu mon passe-temps. Parfois je m’arrêtais au bord du chemin. Parfois il n’y avait pas de chemin, alors je m’allongeais dans l’herbe où sur la pierre. Je mangeais quand j’avais faim. Me reposait quand j’étais fatigué. Me lavait quand j’étais sale. Buvait quand j’avais soif. Et le reste du temps : Marchais pour avancer.
Un matin trois créatures très familières nous réveillèrent. Trois créatures, trois chats, ne jouons pas sur les détails. La première était fine, blanche avec de pâles rayures marrons sur le dos, belle, hystérique, idiote, gracieuse, niaise avec une voix particulièrement stridente et aigus : Chérie. C’était son nom. Le second était un matou très baraque qui marchait toujours comme un blessé de guerre. Il était gris avec des rayures plus foncés. Ses crocs étaient jaunes et il avait un bout de l’oreille gauche qui semblait être partis avec sa douceur. Lui c’était Barrow. Enfin le troisième était noir avec une liste, le poitrail, le bout des pattes et de la queue blancs. Il avait des yeux de chouettes, un nez tout noir au milieu d’une zone blanche, une petite bedaine qui indiquait qu’il venait de manger, assez musclé, avec un air de chaton n’ayant jamais eu de mère. C’était presque le cas il l’avait connu qu’un mois. Son nom échappait une mélodie italienne : Orféo. Ces trois phénomènes, comme les qualifiait l’imparfait moi, se sentaient obligés de faire des rimes à chaque fois qu’ils parlaient. Enfin les trois, surtout Chérie. Enfin les trois, uniquement Chérie. Les autres faisaient parfois des tentatives qui finissaient laborieusement. Chacun deux se présentèrent et l’imparfait moi fit sa présentation également et prit le mienne en charge. Les autres aurait appelé cela un assisté. Moi je ne sais pas comment j’appelle cela. Un assisté aussi peut être. Non, je n’en sais rien. Ce n’est pas pareil. L’imparfait moi ne me demande pas avant de faire les choses à ma place. Enfin de compte cela m’arrange. Je ne suis pas associable, j’ai rien à dire, c’est différent. Tout d’un coup j’alignai des pensées en une succession cohérente : Si quelqu’un nous voyait sans nous connaitre, quoi que ce dernier facteur n’ajoute rien, il nous prendrait vraiment pour des fous … Une précieuse ridicule, un bourreau cruelle, un imbécile heureux et un insensible quasi-muet. Ce qui veut dire que la seule personne que je n’ai pas cité est l’imparfait moi. Donc c’est la seule personne à être normale … Donc l’imperfection est la normalité. Dure. Pour ne plus être perdu il fallait que je me mette à la place de quelqu’un d’autre … Dure aussi. Tant pis, j’arrête les réflexions cohérentes et reste moi-même : l’inexpressif. Cela faisait des heures, que la petite troupe parlait. Pour moi parler c’était écouter. Leurs rimes étaient parfois bien trouvées. Le soleil tapait fort mais moins que tout à l’heure. Il devait être alors plus de midi. On marchait depuis le matin. Avec cette tribu qui s’était jointe à nous. Depuis le début, l’imparfait moi essayait de faire changer d’avis Chérie qui pensait que oui, au fond, il me restait des émotions. Je ne peux pas vous dire. Seulement que moi de mon côté je ne ressens rien. Enfin j’aperçu un ruisseau. Personne ne semblait l’avoir vu. Sauf moi.
« Dans le ruisseau, de l’eau coule à flot. »Et voilà, avec toute leur histoire de rimes, je m’y mettais aussi ! Ils poussèrent tous des cris d’extases. Je n’aimais pas ça. Les cris sur aigus sonnait faux dans mes oreilles. Chérie dit :
« Ah mais il n’avait pas perdu sa langue enfin de compte !
Ne pas m’adressez la parole de la matinée ! Vous n’avez pas honte ?
- Bien voyez-vous, mademoiselle,
Si vous permettez ainsi, les circonstances actuelles,
Ne permette pas de justifier votre emploi du mot « matinée ».
Il y a de cela bien des heures que le soleil s’est levé !
De mon humble avis, il serait plutôt 16 heures,
Si je n’y mets pas trop d’ardeur.
-Oh, mais voyons mon ami,
Ne vous méprenez pas ainsi,
Ce ne serait pas joli.
Cette histoire se finit. » Je ne répondis rien. Elle me fit un sourire large. Je crois qu’elle m’aimait bien. Je crois qu’elle était prétentieuse. Je crois qu’elle se trouvait belle. Je crois qu’elle était belle. Je crois qu’elle se pensait très distinguée. Je ne sais pas si elle l’était vraiment. Je ne sais pas si je l’aimais bien. Je ne sais pas si elle m’énervait. Je ne sais pas si je trouvais qu’elle en faisait trop. Mais toutes ses possibilités effleuraient à grands coups de pattes mon esprit. Dans ce ruisseau, il y avait beaucoup de courant. Beaucoup trop pour qu’aucun chats puissent le traversé sans s’y noyé. Une fois qu’on s’était tous désaltéré, on était obligé de traverser pour continuer notre marche. L’imparfait moi aperçu un tronc d’arbre qui pouvait à peu près nous le permettre. Chérie se plains immédiatement, du fait qu’elle ne voulait pas tomber, qu’elle ne savait pas nager et qu’elle avait très peur. Moi non plus je ne savais pas nager. Mais si je tombais, je savais que l’imparfait moi me sauverait. Seulement il semblait s’occuper de quelqu’un d’autre maintenant. Il proposa d’aider Chérie et de l’épauler. Il n’y avait que lui et Barrow qui savait nager. Chérie débita encore ses rimes fatigantes et Orféo et Barrow ouvrirent encore de grands yeux :
« Hey Compère,
Etes-vous sûr que vous feriez l’affaire ?
Finalement vous n’êtes pas aussi dur que le fer …
et si vous étiez en train de perdre vous repères ? » Oui, l’imparfait moi, ne savait plus où il en était, je crois qu’à force de lui parler, Chérie lui plaisait. Pourtant il semblait ne pas la supporter quelques heures auparavant. L’imparfait moi, ou son compère comme l’autre l’appelait, soupira et s’avança vers le tronc. Chérie s’offusqua :
« Oh mais votre petite poire,
Signerait-elle un au revoir ?
Allons ne vous laissez pas absorber par le noir !Vous étiez censé mon avis de changer ,
Or vous n’avez pas réussi,
Je vous considère donc, dénudé d’esprit. »Je ne sais pas pourquoi. Je n’avais pas suivi. Mais cela ne plus pas à l’imparfait moi. Il lui dit alors de traversé seule. Il m’appela. Il me dit de traverser en premier. Il me dit qu’il était juste derrière moi mais qu’il m’avait sauvé une fois de la noyade et n’espérait pas avoir à la refaire. Je ne comprenais pas pourquoi je devais y aller avant. Je ne comprenais pas pourquoi moi. Je pensais que c’était dangereux parce qu’il me dit juste avant qu’il tenait à moi. J’avais souvent entendu de ma mère, qu’avant de perdre un être qu’on regretterait, vaut mieux le lui dire en prévention. Je n’en voyais pas l’intérêt. Et ça voulait dire que j’étais censé éprouver de l’amitié pour l’imparfait moi ? L’imparfait moi était juste l’imparfait moi, rien d’autre. C’était déjà beaucoup de rentrer dans ma vie comme ça. Je ne réfléchis pas plus. Je me lança sur la tronc. Rien ne se passa. A part que j’arrive sain et sauf sur la rive d’en face avec l’imparfait moi et Orféo qui le suivait de peu. Barrow était derrière en escortant Chérie.
[5 moons ago]
Les jours passèrent, après une longue période où la troupe était joyeuse. Enfin ceux qui le pouvait. Après des chants, des rires, des cris. Après 2 lunes de marche. Le moral était à zéro. Le mien n’avait évidemment pas changé. Prenons une échelle de 0 à 10. 0 c’est le pire, rien ne va plus, la déprime. Et 10, c’est le mieux, tout va bien, l’extase. 5 c’est le milieu, ça va ni bien ni mal. J’étais là. Coincé dans l’indifférence. Enfin c’est ce qu’on me disait moi je m’ne rendais pas compte. Je m’en fichais. Je crois que si Chérie ne savait pas où on allait, l’imparfait moi aurait fini par la laisser. Même si je crois qu’au fond il l’aimait bien. Il n’aimait pas Barrow. Il me l’avait dit. Il aimait bien Orféo parce qu’il le trouvait attendrissant. Enfin après, tant d’efforts, Chérie n’avait pas menti, on arrivait dans une forêt, où l’odeur de chat ne manquait pas. L’odeur du gibier était aussi très alléchante. Dans un coin tranquille, on se reposa. J’avais eu très faim, très chaud, très soif. Je n’avais plus faim, plus chaud, plus soif. Pour la première fois depuis des lunes je pouvais affirmer un truc : J’étais bien. Je le savais. Le pèlerinage et tout ce qui va avec là, oui toutes ses bêtises. Oui ça, c’était finit. Tant pis. Tant mieux. Chérie, Barrow et Orféo n’avait pas la force de faire le chemin du retour. Chérie parti en ville, en espérant trouver des bipèdes. Orféo partit errer dans le coin et disait qu’il voudrait vivre des croquettes que les bipèdes lui donneraient par pitié. Barrow continua encore un peu le chemin seul. Il disait qu’il n’y avait pas assez de gibier pour lui ici, et quand deux secondes il aurait vidé la forêt. La vie de bipèdes n’était pas pour lui, il s’ennuierait. L’imparfait moi voulait rester ici. Il n’avait pas l’envi de continuer plus. Moi non plus. Moi aussi. Je le suivais. On resta dans cette forêt en solitaire. Non pas en solitaire. En couple. Non pas en couple. En duo. Non pas en duo. En semi-solitaire. Oui c’était ça, parce qu’on était deux. Pourtant 4 lunes plus tard, l’imparfait moi, me dit que c’est bipèdes de là-bas lui manquait. Que sa petite vie bien rangée, comme il me l’avait dit, aussi lui manquait. Moi je ne dis rien. Cependant, durant ses 4 lunes, je lui avais parlé. Avec lui je pouvais parler. Mais il disait quand même que le fait de vivre avec quelqu’un qui parle toujours sur le même ton neutre et n’exprime aucun sentiment, le laissait face à la solitude. Il m’avait dit qu’il ne disait pas ça méchamment et qu’il m’aimait beaucoup. Je ne répondis rien. Car comment répondre aux sentiments quand on en n’éprouve plus depuis longtemps maintenant ? Il m’a dit qu’il ne voulait pas me laisser seule. Et qu’il avait appris que dans la forêt il y avait des clans. Le plus près était celui du vent.
Le lendemain même, il m’a accompagné jusqu’à ce clan. Je ne sais pas pourquoi, leur chef a accepté. Ils m’ont énoncé tout un tas de règles. J’ai écouté très attentivement. Je ne sais pas pourquoi, j’étais bien. Je ne sais pas pourquoi, j’ai appris ses règles. Je ne sais pas pourquoi, on appelait ça, code du guerrier. Je ne sais pas pourquoi, on m’a vaguement parlé d’espions. Je ne sais pas pourquoi, j’ai regardé l’imparfait moi partir. Je ne sais pas pourquoi, je lui ai rien dit. Je ne sais pas pourquoi j’ai vécu tout ça seulement parce qu’un monstre à failli me persécuter. Je ne sais pas pourquoi, il y a 11 lunes j’ignorais l’existence de ses terres et maintenant je les foulais de mes propres pattes. Je ne sais pas pourquoi on me donna un nom : Nostalgie des Sentiments. Il n’était pas très correct d’ailleurs parce que la nostalgie est un sentiment et je n’en éprouvais plus. Mais c’était soit disant parce que mes sentiments antérieurs devaient me manquer. Peut-être qu’un jour ce sera le cas. Je ne sais pas. Je ne sais pas encore. L’avenir me le dira.
Mais maintenant voilà une lune que je suis dans le clan. Je suis une flèche. Un espion. C’est ce qui me faut. Etre là sans y être. Coincé entre le visible et l’invisible. Entre le concret et l’abstrait. Le réel et l’irréel. Le commun des mortel et l’extraordinaire de l’éternel. Me raccrocher à la réalité seulement par mes devoirs. Le devoir de servir mon clan. Ce qu’on m’a appris ce jour où l’imparfait moi m’a quitté. Le seul qui pour l’instant a eu le courage d’aimer celui qui ne sait pas aimer. De supporter celui qui ne te supportera jamais. D’espérer là où il n’y a pas d’espoirs. Et de donner en ayant la certitude qu’il n’y aura rien en retour. Rien si ce n’est, le simple fait d’être là. Et c’est se simple fait, qui a nourrit l’imparfait moi. Peut-être qu’un jour, j’y arriverais. J’arriverais à dire 3 mots, 3 syllabes, 7 lettres : Je t’aime. Peut-être que ce sera le jour de ma mort. Peut-être que je dirais je t’aime à la vie. Mais je ne sais pas. Parce que pour l’instant je n’en connais plus la signification. Je crois que la vie vaut la peine d’être vécu, même dans l’indifférence. Pourtant, je veux simplement vous dire, je n’ai ni envie de vivre, ni envie de mourir.