Saletés de chiens ! [Patrouille 1 : Pv Ten, Phénix, Soleil, Sun]

Je dormais profondément, d'un sommeil sans rêve. J'étais épuisée après la journée harassante de la veille. Un guerrier s'était déboîté l'épaule, deux chatons toussaient et un ancien avec des rhumatismes. Une journée normale en soi. Si on oubliait bien sûr l'entraînement au combat de Nuageux Soleil, qui en connaissait d'ailleurs plus que moi, la cueillette et les discussions on ne peut plus animées avec Etoile du Perroquet. Malgré les efforts que j'essayais de faire pour tenter de me réconcilier avec elle, elle restait butée, refusant toutes conversations. Je me levai doucement, encore un peu comateuse. Je titubai légèrement vers la couche du guerrier blessé, qui ronflait légèrement. Le chaton a côté, gémissait dans son sommeil et je m'empressai de lui toucher le front pour voir si il était fiévreux. Malheureusement, oui. Je trottinai discrètement vers la réserve, attrapa une boule de mousse et essaya de le rafraîchir. La chatonne, sa sœur probablement ouvrit soudain les yeux et se redressa, un peu hagarde. D'un sourire, je la rassurai puis lui ordonna de se rallonger et de se reposer.

Puis, je sortis à l'air libre. L'aube était à peine levée, le ciel avait encore une magnifique teinte rosée. J'inspirai profondément puis avançai vers la pile de gibier, qui semblait étrangement vide. Du coin de l’œil, j'aperçus la fourrure rousse d'Echo de Flamme, ma meilleure amie et lieutenante, qui distribuai les tâches aux quelques guerriers déjà levés, malgré l'heure matinale. Je la saluai d'un hochement de tête puis allai m'installer dans un coin, à portée de ma tanière. Je mangeai la moitié du lapin et laissai l'autre pour Nuageux Soleil. Je fis ma toilette, puis rentra à l'intérieur, pour m'occuper de mes petits patients. La chatonne était debout et regardait autour d'elle, curieuse comme tout. Je la grondai gentiment, l'attrapa la déposa sur sa litière et alla lui chercher un peu de miel. Je lui donnai, au moment où une voix douce retentit. Je levai la tête et huma l'odeur de Cœur de Nuit, une jolie guerrière tricolore.

« Salutation Fleur de Soleil, cela te dirais de venir nous accompagner à la patrouille de chasse avec Nuageux Soleil ? Si tu es d'accord, rejoins-nous à l'entrée du camp où nous vous attendrons. »

Je m'écartai de la petite chatte et allai réveiller Nuageux Soleil, d'un petit coup dans les côtes.

« Debout ! Tu as du entendre Cœur de Nuit, nous partons en patrouille. Nous en profiterons pour ramasser quelques plantes : ça ne peut pas faire de mal. »

Je sortis de nouveau, alla chercher la mère des deux chatons qui étaient contagieux et lui demanda de garder un œil sur ses enfants, histoire d'éviter qu'ils ne se boulottent nos réserves et s'empoisonnent. Je rejoignis ensuite le reste de la patrouille, attendant les retardataires.

« Où allons nous ? Près de la crevasse ? »

Les rayons filtrant à travers l'antre virent danser sur le pelage du rouquin. Il ouvrit immédiatement les yeux, tournant sa tête vers la source lumineuse. Le soleil. Ca faisait longtemps. Le froid était bien présent et le ciel était maintenant gris la plupart du temps. Mais hier, le ciel avait littéralement prit feu dans des teintes orangées, signe qu'aujourd'hui serait une belle journée.

L'apprenti se redressa et s'étira, prêt à entamer la journée. Il ébroua son épais pelage hivernal puis entreprit de lécher sa patte blanche pour se la passer sur la tête. Il dressa les oreilles à l'approche de Lueur Ténébreuse, l'ancienne meneuse. Une patrouille ? Nuage du Phénix grommela son acquiescement.
Après tout, chaque patrouille le rapprochait un peu plus de son baptême de guerrier. Cette pensée le revigora. Guerrier. Il avait tellement hâte. Personne pour lui dire quoi faire. Libre d'aller où il veut. Enfin pas vraiment, mais pour lui, devenir guerrier c'était acquérir une certaine indépendance ou il pourrait plus facilement contourner les règles. Ce n'était plus un chaton abandonné dans la lande. Il serait Cœur de Phénix, ou Puissance du Phénix, quelque chose dans ce ton.

Le rouquin sortit de la tanière d'un pas dynamique pour rejoindre la patrouille déjà prête.

Passons par la lande, rétorqua Nuage du Phénix à Fleur de Soleil.

Lorsque la patrouille fut au complet, les félins montèrent la colline au pied de laquelle le Clan était à l'abri du vent. Une bourrasque glaciale souffla brutalement dans le pelage de Nuage du Phénix. Il rentra sa tête dans ses épaules son épaisse fourrure toute gonflée.
Pas le moindre signe de lapin en vue.

Ma respiration se faisait calme, douce. Les images d'une nuit pâle éclairaient mes pensées. Le doux chant de la nature endormie venait remplir le silence, alors que les lucioles menaient leur chemin, laissant un sillage de lumière derrière elles. Les arbres s'étaient dénudés de leurs parures, et continuaient de se dresser bien haut, comme des piliers pour soutenir le ciel nocturne. Les éclats froids des étoiles mouchetaient ce noir impénétrable, qui se tenait fermement au dessus de nos têtes. La lune éclairait les lieux, de sa douce couleur argentée. J'avançais dans cette forêt sage, et calme. Je ne voyais rien, absorbée par les ténèbres. Mais les rayons lunaires s’alignaient devant mes pattes, éclaircissant ma voie et les brins d'herbes tendres.

Mes yeux étaient sous le charme de ce paysage nocturne, qui m'émerveillait. Seulement, je revins en vie alors que je sentais un coup de patte me rentrer dans les côtes. Mon regard doré s'ouvrit sur mon mentor, et la magie de mon rêve se volatilisa. Je grognais, alors que Fleur de Soleil m'annonçait qu'on partait en patrouille. J'étais si bien endormie, emportée par le songe de ma nuit. Je ne savais pas que lorsqu'on était guérisseur on faisait des patrouilles. Je pensais avoir cessé de marcher sur la voie du guerrier. Le parfum alléchant du lapin qui m'attendait m'obligea à me lever.

Les rayons d'un soleil froid s'attardaient sur mon corps, alors que je finissais mon repas. Mon mentor était déjà partie rejoindre la patrouille. Tout en me pourléchant les babines, je m'étirais lentement. A ce rythme là, mes camarades devaient m'attendre depuis un petit moment. Je sortis de l'antre du guérisseur, de ma démarche souple. Je vis ma patrouille devant l'entrée du camp. Coeur de Nuit, Fleur de Soleil, Lueur Ténébreuse et ... Nuage de Phénix ?! Encore lui ?! Mon pas se ralentit précipitamment alors que mon regard se durcit à sa vue. Passer une matinée à chasser avec cet, ce ... Je soupirais, alors que je les avais rejoint.

« Où allons nous ? Près de la crevasse ? demanda mon mentor.
- Passons par la lande.
- Tu te prends pour le chef de la patrouille novice ? Répliquais-je. »

Cela ne me plaisait pas la façon autoritaire que prenait Nuage de Phénix. C'est Cœur de Nuit qui dirige notre équipe, pas lui. Alors qu'on sortait du camp, je passais devant l'apprenti roux, lui fouettant le museau au passage. On escaladait la colline, où le vent nous attendait. Il soufflait, si froid, et le courant d'air traversait ma peau. La bourrasque s'arrêta un instant, et j'en profitais pour m'éloigner un peu de ma patrouille. Je humai l'air, à la recherche d'une quelconque proie à ramener. J'espérais épater la patrouille avec mes talents de chasseur, et montrer à Nuage de Phénix que j'étais plus forte que lui. Misérable un jour, misérable toujours.

J'aperçus un lapereau, à plus de trois longueurs de queue. Il s'était sûrement perdu, alors qu'il préparait son hibernation. D'un pas silencieux, et dans la position du chasseur, je m'approchais lentement de lui. Mes coussinets se posaient les uns après les autres, sur l'herbe givrée de la lande. Mon souffle ne faisait plus qu'un avec le rongeur. Concentrée sur ma chasse, je ne fis pas attention aux alentours, et j'oubliais ma patrouille, mon regard doré fixé sur ma proie.